Noémie Sauve : Ce qui tremble et palpite
par Bernard Goy
L’oeuvre de Noémie Sauve explore le registre singulier de l’animalité, à la fois par l’iconographie et le traitement foisonnant et sensuel, voire baroque, des figures.
Le plus souvent chimériques, celles-ci anticipent, ou préviennent, selon que l’on y souscrit ou que l’on s’y oppose, les mutations potentielles dont nous ressentons confusément l’approche, sinon l’imminence.
Dans cet œuvre, souvent les représentations animales sont traitées sur le mode de la déploration, ou au moins selon des modes opératoires inattendus. Le sujet paraît saisi dans l’instant ou au contraire mis en scène dans toute l’étrangeté de son espèce, dépouillé d’anthropocentrisme. C’est ainsi qu’il se produit, dans une condition d’apparaître sans annonce ni protocole : ombre, couleur, forme, objet, sujet, tout cela ensemble et déjà autre chose, alors que le regard qui se pose sur ce travail hésite, entre la reconnaissance d’un animal improbable et le plaisir de rester en deçà, à la surface du dessin et de sa réjouissante fantaisie graphique. En s’aidant des titres, il est possible de déceler une figure animale intelligible dans la masse grise qui se montre, ou bien, tel le chasseur bredouille, de la frôler sans la voir, alors que tapie dans la frondaison des fusains, elle sourd dans le dessin suivant.
Dans les grands formats en particulier, la gestuelle alliée à la précision restituent ensemble une brutalité toute phénoménologique de ce qui survient, sans se nommer encore, et une qualité onirique, propageant un sentiment diffus. Ca ressemble pourtant à quelque chose que l’on connaît, ou plutôt à quelque chose que l’on a connu, nous- même étant enfants, ou plus sûrement nos parents, une rencontre soudaine en fin de journée, avec au détour d’un champ, au retour d’une promenade, entre les maïs, tout à coup, un renard, un blaireau, ou une martre aux petits yeux qui fixent comme des onyx.
Et malgré la trace du geste et la bidimensionalité, un fort indice de réalité se manifeste, étrangement, un peu comme dans l’effet culturel du noir et blanc photographique.
On a envie de respirer tour à tour les parfums du soir s’élevant à la fraiche ou encore l’odeur forte de la fumée du bois brulé exhalé par la cheminée d’une masure, un froid matin d’hiver dans un paysage enneigé de Brueghel. Ca rode alentour.
Alors très vite une question se pose : comment s’opère ce travail de restitution longue et lente, par un dessin précis, d’une expérience immédiate et brève ? Car même si elle a pu travailler à partir d’images, Noémie Sauve retrace une expérience de la présence réelle dans ses dessins.
Le pelage d’un lièvre, mâtiné d’une autre bête à peu près indescriptible, porte à la fois des brindilles de lichens, le stress de la course effrénée qui le hérisse, et le souvenir de Dürer. Et s’il est vrai que la plupart des artistes assument un héritage ininterrompu, cette œuvre a des aïeux : Franz Marc entre autres, dont Noémie Sauve retrouve intuitivement et sans la connaître l’entreprise empathique si romantique. Après ses tableaux de chevaux, l’artiste expressionniste allemand avait pour projet de peindre non plus l’animal mais d’en épouser la vision supposée, la peinture confinant alors à l’abstraction, bien que paradoxalement déterminée par le corps, un corps d’emprunt . Il y a du chamanisme dans cette empathie partagée à son tour par Noémie et d’autres singuliers d’une histoire de l’art, dont a pu rendre compte, par exemple, Laurence Bertrand-Dorléac dans son livre L’ordre sauvage. Jusqu’à l’empathie physiologique inédite dans l’œuvre de Art Orienté Objet.
Noémie Sauve préfère la transposition d’une sensation et, ce faisant, se rapproche peut-être davantage de certains tableaux de Francis Bacon, où l’hirsute côtoie le savoir faire académique. Elle inscrit aussi parfois quelques mots dans l’espace de la fiction, des sortes de titres, souvent des références poétiques, ou encore de pures notations informatives. Lorsqu’apparaît le mot « mirador », il désigne l’expérience d’une chasse à l’affut et à l’arc dans les Ardennes, mais surtout l’immersion pendant plusieurs semaines dans le monde sauvage, non pas celui des grands espaces autrefois exotiques du National Geographic, mais celui tout proche des grands espaces exotiques désormais, traversés à 385 km/h par chacune et chacun, les yeux rivés au minuscule écran d’un smartphone dans l’habitacle climatisé d’un TGV.
Après avoir élu domicile dans le village devenu célèbre grâce à eux et notamment à un certain tableau de Jean- François Millet, les artistes de l’école de Barbizon alertèrent Napoléon III sur l’urgence de maintenir et protéger la forêt de Fontainebleau.
Après avoir planté un chêne à Cassel en 1982 lors de la Documenta 7, Joseph Beuys espérait que 7000 chênes en tout seraient plantés par les témoins et les descendants des témoins de son acte ; une association maintient toujours vivant le projet aujourd’hui.
Dans notre monde plus horizontal, plus féminin aussi, où les empereurs et les héros sont fatigués, Noémie Sauve,
comme d’autres artistes ou actrices et acteurs du monde qui vient, est engagée dans une aventure agraire originale, d’où elle tire les « graines paysannes » insérées à ses travaux graphiques sur l’animalité.
Mais son engagement n’est pas le sujet de son œuvre, comme trop souvent l’engagement bien pensant peut tenir lieu de sujet, voire de qualité, à des démarches vélléitaires.
Si sujet il y a, il est multiple, pluriel, insaisissable. Au didactique lièvre mort de Beuys, elle substitue les sauts innombrables des lièvres à l’aube, vivants et réels, décorants les clairières de leurs jolis excréments et cependant mythiques, puisqu’invisibles au plus grand nombre et, un jour peut-être, disparus.
Plus preste encore si c’est possible, le sujet serait peut-être le frôlement d’un vol d’engoulevent dont il lui faudrait restituer toute la complexité sur le papier, sans peser plus qu’une plume.
Loin de toute littéralité appuyée, cette œuvre n’en est pas moins en prise avec une réalité anthropologique et politique de notre temps, à savoir l’écart inédit creusé par notre société entre animalité et humanité, dont on voit qu’il menace également l’une et l’autre.
Bernard Goy Strasbourg, mars 2016
Bernard Goy est Inspecteur conseiller pour les arts plastiques à la DRAC Alsace Champagne Ardenne Lorraine, Chargé
d’enseignement spécialisé à l’Université de Strasbourg, Faculté des Arts, depuis 2007
Directeur du FRAC Ile de France de 1993 à 2005
PAST, Université Paris IV Sorbonne (2005-2006)
PAST, Université Paris VIII Saint-Denis (2003 – 2004)
Chargé de cours, Université Paris X Nanterre (1995-2005)
Noémie Sauve, Mode d'emploi
par Raphaël Abrille
Si l’aménageur et l’urbaniste pensent le territoire pour tous, ils ne l’adaptent pas nécessairement à chacun… Plus l’individu s’écarte de la norme statistique qui définit les comportements et les usages communs, moins il est susceptible de s’épanouir pleinement dans cet espace partagé. La place laissée aux autres composantes – non-humaines – du vivant dans nos cités est très révélatrice de cette tension entre la norme et la marge. Si le Tiers paysage cher à Gilles Clément fait son chemin dans les consciences et tend à laisser plus de « champ libre » à la spontanéité de la nature dans les squares, parcs et jardins, l’adaptation et la clandestinité restent les modes majeurs d’ « être en ville » pour la vie sauvage. Aussi n’est-ce pas le moindre des émerveillements du citadin que de surprendre la capacité du vivant à se jouer des contraintes urbaines pour naître, pousser ou grandir, niché au coin d’une fenêtre, planté dans un interstice de macadam ou caché dans un conduit d’aération.
Le travail de Noémie Sauve procède de cet émerveillement autant qu’il entend le susciter. Partant d’un questionnement fondamental sur la manière d’habiter un monde aujourd’hui largement anthropisé, l’artiste multiplie les initiatives visant à pouvoir occuper le territoire par le simple fait d’y exister. Les actions qu’elle met en œuvre sont aussi diverses que l’expérience du squat (à Grenoble), foisonnant d’activités publiques (concerts, conférences, réunions de quartier, partages de compétences…) ou que la mise en scène performative et collective de ses premières œuvres dans les rues de Paris. Elle en tire ses incunables Disconographiques (depuis 2006) – aimable collage pop-surréaliste de
« disco » et de « iconographique ». Elles prennent la forme d’une séries de photographies documentant l’énergie d’un « je danse donc je suis » (inspiré du DJ Culture d’Ulf Poschardt – 2002) dans des rues et sur des places qui ne demandaient, hélas, pas tant… Son implication dans l’association Clinamen qui, depuis 2012, s’efforce de dynamiser les territoires urbains par la promotion des pratiques paysannes en ville, procède de la même volonté de mettre les arts plastiques au service d’un collectif citoyen… Parmi les multiples actions de Clinamen, celle qui consiste à faire paître des troupeaux de moutons dans plusieurs villes de la banlieue parisienne au gré de leur transhumance urbaine, est sans doute la plus signifiante et médiatisée. En imposant la présence d’animaux d’élevage dans un contexte a priori impropre à les recevoir, Clinamen entend porter l’agriculture au milieu des gens des villes, questionnant la manière d’habiter la cité et de s’y nourrir en initiant des moments de partage autour des enjeux contemporains de l’agriculture. A ce collectif qui incarne physiquement les thèmes qui lui sont chers, Noémie Sauve tente de donner un terrain de représentation « disconographique », notamment en incluant des graines issues des légumes cultivés par l’association dans certains de ses dessins à des fins de diffusion de cette matière première paysanne. Elle s’investit autant que possible dans les actions du collectif, créant un mobilier urbain pour les transhumances ou participant ponctuellement à la mise en œuvre des structures qui abritent les activités agropastorales de l’association : bergeries, serres ou hangars.
Noémie Sauve exerce également ces pratiques constructives au sein du collectif Jolly Rogers, composé d’architectes, d’urbanistes, de chefs de chantiers, de paysagistes et d’artistes qui conçoivent et bâtissent certaines structures d’accueil du festival Jazz à Luz ou encore des bergeries urbaines. Ces structures s’entendent, pour Noémie Sauve, comme autant d’architectures improvisées et temporaires mettant en œuvre des matériaux de récupération rassemblés en grande quantité afin de ne jamais sacrifier l’esthétique du résultat à l’économie des moyens. Elle y éprouve, outre l’intégration au paysage, les objets, les outils, le matériel et les matériaux qui vont occuper une place si singulière dans son travail plastique d’atelier. Ce n’est à l’évidence pas un hasard si, après quelques années nomades d’un apprentissage volontairement plus expérimental qu’académique, entre Lyon, Grenoble, Paris et le Québec, l’artiste met tant de soin à choisir l’atelier qui sera à même de recentrer sa pratique personnelle. Elle jette son dévolu, en 2011, sur les ateliers Paul Flury à Montreuil-sous-Bois, structure qui met à la disposition des artistes qui y travaillent un vaste échantillonnage d’outils de production : fonderie, fours, ateliers de moulage, de soudure, de taille… Désormais « obsédée par l’atelier », Noémie Sauve
éprouve sa boulimie du « faire » et expérimente sans relâche. Elle mêle avec une égale aisance une intense expérience du dessin – pratique directe dont la spontanéité est soutenue par son goût pour l’improvisation au fil des pages de nombreux carnets expérimentaux – à des procédés mécaniques complexes. Ainsi, La Bête (2015), tête de canidé obtenue en taille directe sur un bloc de marbre de Carrare crayonné a posteriori, fait l’objet d’une manipulation aussi savante qu’expérimentale pour obtenir la série des Peaux de sculptures (2015) : gaufrages passés sous presse à partir d’empreintes de la sculpture confectionnées en pâte à modeler et enduites de colle de peau de lapin, puis repris à la mine graphite et aux crayons de couleur. Dans ce mode d’emploi vertigineux, chaque étape de la réalisation mobilise le sens de l’improvisation inné de l’artiste, réinventant sans cesse un processus qui lui donne à rebondir encore et toujours et à brouiller les catégories techniques. Qu’est-ce qu’une Peau de sculpture : une estampe, une empreinte, un dessin, une sculpture ?
L’outil, en ce qu’il permet son action artistique – architecturale ou plastique – occupe une place importante chez une artiste qui, selon son propre aveu, « chemine avec
l’artisanat ». Elle se révèle en particulier en 2014-2015, lors d’une résidence dans le domaine de Belval (Ardennes), ancien terrain de chasse des fondateurs du musée de la Chasse et de la Nature reconverti en centre de formation, de recherche en éco-éthologie et d’expérimentation artistique. Dans ce territoire paradoxal, aussi sauvage que cultivé, à mi-chemin entre la forêt primitive et le parc de château, où se bousculent les usages et les représentations de la nature, Noémie Sauve suit notamment les participants à un stage de tir à l’arc. Elle initie un projet « entre chien et loup », intitulé Domestication vs Pleine Lune. Les travaux issus de son séjour déclinent et décomposent, entre autres choses, les outils nécessaires à l’archerie. Les flèches, les décocheurs, les viseurs et les bagues d’archer sont réinterprétés et déconstruits en de multiples techniques plastiques : dessins, estampes ou sculptures. Ces dernières convoquent l’étain, le verre, le bronze et la céramique pour former la série des Animaux à nourrir, hybrides zoomorphes aux formes préhensiles, armes menaçantes à la merci d’une trop forte pression des doigts de qui les brandissent.
Cet attachement à l’outil avait déjà fait l’objet d’un dessin, parmi les plus spectaculaires de Noémie Sauve, produit à l’occasion d’une résidence au centre d’art L’Aparté, près de Trémelin (Ille-et-Vilaine), en 2014. L’Attelage (2015) résulte d’une proposition d’étude de territoire inscrit dans la lignée du questionnement de l’artiste sur les enjeux de la cohabitation et du partage de l’espace entre l’humain et le non-humain. Appliquée par l’artiste au domaine de Trémelin, forêt récemment aménagée pour l’écotourisme, cette recherche s’attarde sur l’une des distractions proposées aux usagers du lieu : les courses de chiens de traineau. Mettant en œuvre de complexes attelages de samoyèdes et de chiens esquimaux du Groenland, ces courses fascinent l’artiste par la violence tourbillonnante de la meute autant que par les moyens matériels (harnais, colliers, longes…) qu’il convient de mettre en œuvre pour canaliser l’instinct animal au profit du divertissement.
Noémie Sauve apparie son esthétique à une forme de lyrisme baroque dont témoigne la mise en scène précoce et délirante, devant le Centre Pompidou, de son tableau La Danseuse, en 2007. Elle en conserve l’image photographique en exergue à son blog, comme une auto-injonction permanente à ne pas trop verser dans le « romantisme » que pourrait susciter le labeur solitaire de l’atelier. « C’est beaucoup de travail pour être aussi proche du mauvais goût et aussi chargé sans verser dans le kitsch » confesse celle qui emploie toujours crayons de couleurs et paillettes dans ses dessins ou met volontiers en scène ses sculptures sur fond de nuées pop-psychédéliques (Ours hydrocéphale, 2014). Ce choix esthétique revendique une finalité politique. Par l’émerveillement qu’il suscite, il entend rendre accessible plus grand nombre l’iconographie parfois complexe que propose l’artiste, sans avoir nécessairement recours au mode d’emploi qui définit une part du paradigme de l’art contemporain. Il peut se substituer, dans le dessin Végétal vs Minéral (2015), au propos – autrement mais également politique – que l’artiste tient face aux choix d’aménagement du domaine de Trémelin. Planté, à des fins d’agrément, d’essences
résineuses incapables de s’enraciner dans le sol schisteux qui les accueille, il est délaissé par des agents forestiers embarrassés des maigres ressources économiques qu’il procure et indifférents à des enjeux touristiques qui ne relèvent pas de leurs compétences. La forêt voit ses sentiers de promenade progressivement encombrés d’arbres que le moindre coup de vent déracine.
Le cimetière d’arbres de Trémelin métaphorise singulièrement les conflits d’usages du territoire si familiers aux questionnements fondamentaux du travail de Noémie Sauve. Avec Végétal vs Minéral – titre comme toujours soigneusement choisi – elle en propose une représentation quelle soumet, prioritairement, au regard des habitants qu’elle s’est attachée à côtoyer durant son processus de recherche et de création. Libre à eux, comme à l’ensemble des regardeurs de l’œuvre protéiforme de Noémie Sauve, d’en apprécier le souffle poétique ou d’en interroger la portée critique.
Raphaël Abrille est conservateur-adjoint du musée de la Chasse et de la Nature (à Paris et au Château de Chambord) depuis 2002. Il a contribué au réaménagement muséographique du site parisien entre 2005 et 2007. Il collabore au développement des musées de France consacrés à la cynégétique: au musée de la Vénerie de Senlis, dont il est conservateur (2005-2006) et au musée de la Chasse de Gien, où il contribue au pilotage scientifique du projet muséographique (2008-2011). Au sein de ces musées ou en tant que co-commissaire de la manifestation « Monuments et Animaux » pour le centre des Monuments Nationaux (2011-2012), il s’attache à élaborer un dialogue intime entre l’art contemporain et lieux de patrimoine. Ses commissariats, recherches et publications récentes portent tour à tour sur l’animalité dans la création contemporaine, sur l’histoire des musées de chasse en Europe, sur la mise en scène et la représentation du trophée, sur la peinture de chasse de Gustave Courbet et sur l’histoire de la photographie cynégétique.
Noémie Sauve, Directions for Use
par Raphaël Abrille
Developers and planners imagine territories for all to share, but in so doing they do not make them suitable for each individual person. The more one drifts from the statistical norm that defines common behaviors and manners, the less one is likely to fully blossom within this shared space. The space left for other, especially non-human, elements of life in our cities is revealing of this tension between the norm and the margin. If what Gilles Clément has called the “third landscape” has allowed nature to develop more spontaneously and freely across squares, gardens, and parks, it nevertheless remains the case that wildlife’s dominant ways of being in the city remain adaptation, hiding, and fugitivity. The city dweller never ceases to be amazed by the power of the living to defy urban constraints in order to emerge and grow – whether perched on the edge of a window, jutting out a crack in the asphalt, or hidden in an air vent.
The work of Noémie Sauve proceeds from this amazement as much as it attempts to provoke it anew. Following a longtime interest in modes of inhabiting a world largely meant for humans, she has undertaken multiple projects aiming at being able to occupy a territory by the simple fact of existing in it. These have taken a number of different forms, from organizing public events (concerts, lectures, community meetings, skillshares…) when she was a member of a squat (in Grenoble), to staging collective and living adaptations of her early visual work in the streets of Paris. She has drawn from this for her series “Disconographies” (2006 onwards) – a genial pop-surrealistic collage blending disco and iconography. Inspired by Ulf Poschardt’s 2002 book Dj Culture, this series of photographs documents the energy of an existence centered on dance taking hold of streets and squares, which, alas, didn’t ask even ask for that.
Her involvement in Clinamen, an organization founded in 2012 that seeks to galvanize urban areas by promoting pastoral activities, stems from the same desire: to use fine art as a tool for collective action. Among the many actions of the collective, the most significant and publicized has been doubtlessly the grazing of a flock of sheep across the urban landscape of the northern banlieues of Paris. In making farm animals present in an
unsuitable context, Clinamen intended to bring agriculture amidst townspeople, and in so doing to question the modes of living and eating by initiating moment of communality and exchange around the contemporary issues of agriculture. Noémie Sauve works at generating a “disconographic” representation of this collective, which embodies the issues she holds dear – by, for example, incorporating heirloom seeds in some of her drawings, offering a new circulation to this essential peasant matter. She is dedicated to the life and activities of the collective, for example, by designing street furniture for transhumance and by participating in building the infrastructure needed for the pastoral activities of the organization – such as sheep pens, greenhouses, and sheds.
Noémie Sauve equally participates in Jolly Rogers, a collective composed of architects, town-planners, site managers, landscapers, and artists, who together devise and build urban sheepfolds as well as part of the infrastructures of Jazz à Luz, a festival of jazz and improvised music in the Pyrenees. These structures are conceived as forms of improvised and ephemeral architecture, which use a great quantity of reclaimed and recovered materials while never sacrificing the aesthetics of the project to the economy of means. In this practice, she experiences, besides the integration into the countryside, objects, and tools, the materials that will be of singular importance in her studio work. After a long nomadic apprenticeship, more experimental than academic in nature, between Lyon, Grenoble, Paris, and Quebec, it is hardly surprising that it took her quite some times to choose the most adequate studio for her own personal artistic practice. In 2011, she started working in the Ateliers Paul Flury in Montreuil-sous-Bois, which offers a great variety of tools of production, including foundries, ovens, molding studios, cutting studios… From that point on, “studio-obsessed,” Noémie Sauve has felt free to fulfill her need to create and to experiment relentlessly while doing so. In her work, she combines an intense involvement with drawing – a direct and spontaneous practice supported by her taste for improvisation, relentlessly filling up numerous experimental sketchbooks – with a taste for complex mechanical processes. For instance, La Bête (2015) presents a canine head sculpted in a block of Carrara marble and penciled afterwards. In her Peaux de Sculptures [Sculpture Skins] series (2015), embossings are pressed from the imprint of a sculpture made out of modeling clay, coated with rabbit- skin glue, and then gone over with graphite pencil and colored crayons.
Each step of this vertiginous process mobilizes her innate sense of improvisation, allowing her to continuously reinvent a process that endlessly revives her, allowing her to rework and rethink basic technical categories. In the end, what is a Sculpture Skin exactly? Is it a drawing, a print, a sculpture, an engraving?
Tools that allow artistic creation (whether in relation to architecture or the fine arts) occupy an important place for this artist who admits that she “walks along with arts and crafts.” This relation between arts and crafts was highlighted in her 2014-15 residency in The Domaine de Belval (Ardennes). The former hunting ground of the founders of the Musée de la Chasse et de la Nature (Museum of Hunting and Nature), the site was converted into a center for the training of hunters, for research in eco- ethology, and for artistic experimentation. Within this paradoxical territory – wild and domesticated at once, somewhere in between castle parks and primal forests – Noémie Sauve has, among other things, followed the trainees of a bow hunting class. There, she initiated a hybrid project she titled Domestication vs Pleine Lune [Domestication vs. Full Moon]. The artworks she brought back from her journey present as much as they distort tools for archery. Arrows, release mechanisms, sights, thumb rings are reinterpreted, deconstructed through multiple formal technics: drawings, engravings, or sculptures. In her sculpture series Animaux à Nourrir [Animals to Feed], tin, glass, bronze, and ceramics are utilized to shape zoomorphic hybrids that one can hold in his hand – threatening weapons at the mercy of the holder’s powerful grip.
Her special attachment to tools had previously been the subject of one of Noemie’s most spectacular works of art, L’Attelage (2015), a drawing that came out of her residency at L’Aparté, an art center near Trémelin, Brittany. The painting arose from the artist’s questioning of the coexistence of and spatial distribution between human and non-human actors. Sauve’s attention was caught by one of the many activities offered to visitors at the Trémelin domain, a forest recently converted into an ecotourism site: sled dog racing. These races, in which mixed teams of Samoyeds and Greenland dogs compete, fascinated the artist for multiple reasons: for the packs’ swirling violence no less than for the material means (harness, collars, tethers) necessary to channel the animal instinct in order to make it a form of entertainment.
Noemie Sauve’s aesthetics are infused with a form of baroque lyricism, a fact attested to her by the precocious and delirious 2007 staging of her painting, La Danseuse, in front of the Centre Pompidou. Up to today, that photographic image remains the header of her blog, perhaps as a permanent injunction to herself against falling into a form of “romanticism” that often arises from solitary studio work. “It takes a lot of effort to get as close as possible to bad taste without falling into kitsch” says Noémie, who still uses crayons and glitter in her drawing and stages her sculptures on pop-psychedelic clouds (Ours Hydrocéphale, 2014). This aesthetic choice lays claims to a political goal: Through amazement that it arouses, it intends to make accessible for a large audience a complex iconography without necessarily appealing to the intermediary of a user manual for the prevailing paradigms in contemporary art. In the drawing Végétal vs Minéral (2015), this could be swapped for the proposition – differently, but equally political – that the artist takes up when faced with the question of the development of the natural reserve of Trémelin. Planted with resinous trees unable to take root in a salty soil, the park is neglected by forest officers who are frustrated by its poor profit, indifferent to touristic issues, which are out of the realm of their competency. The forest’s paths are progressively blocked by trees any wind can uproot.
The tree cemetery in Trémelin stands as a singular metaphor for the struggles at stake in the use of a territory, so intimate to the fundamental questions motivating Noémie Sauve’s work. With a title carefully chosen as always, Végétal vs Minéral, the artist proposes a representation that she submits, first, to the local inhabitants she has interacted with during its research and creation. It is up to them, as to the broader audience looking at this protean work, to appreciate its poetic feeling and to interrogate its critical weight.
Raphaël Abrille february 2016